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Qu’est-ce qu’un psychanalyste ?
La demande adressée à un analyste est celle de quelqu’un qui souffre dans ses pensées et/ou dans son corps et veut être libéré de ce qui fait, ainsi, symptôme. Ce qui se manifeste dans le symptôme est sa réalité la plus intime, et cependant la plus étrangère, car il en ignore la cause.
L'analyste prend au sérieux ce dont le symptôme témoigne. Il ne cherche pas à masquer le message dont il est porteur par un traitement standard, prêt-à-porter (protocoles, exercices), mais il le respecte. L'analyste ne cherche jamais à faire entrer dans un moule, correspondre à une norme sociale ceux qui font le choix d'interroger leur souffrance, car il sait que le message que recèle un symptôme est singulier, que ce qui fait la douleur d'un parlêtre est unique, et que si le symptôme (ce qui dérange et/ou fait souffrir) semble au sujet dénué de toute signification, il est pourtant son invention même et s'est constitué à partir de paroles qui ont été dites, prises au pied de la lettre, de pertes, d'éléments apparemment minimes ou insignifiants, orientant parfois une vie entière, d’événements inoubliables ou refoulés sur lesquels celui qui en souffre n’a pu mettre de mots.
Le parlêtre qui s'adresse à un psychanalyste ignore ce qu'il sait, et souvent même, ignore simplement qu'il sait. Mais il parle, c'est un "être parlant," un "parlêtre", et l'analyste l'aidera à traduire, déchiffrer, lire, le message dont le symptôme témoigne et que porte la parole.
Mais le symptôme a une autre face. Il n'est pas uniquement porteur de sens, il est également constitué d'une satisfaction inconsciente que le sujet ignore et qui lui est tout à fait singulière. C'est ce que Lacan a appelé :" la jouissance". Le symptôme, comme Janus, a deux visages, celui qui veut dire et celui qui veut jouir. Ces deux aspects, caractéristiques de chaque parlêtre, ne peuvent se dissoudre sous l'action de la pédagogie, aucun conditionnement ne peut en venir à bout. Tant que la singularité de ces deux faces du symptôme ne se sera pas faite entendre, il trouvera toujours une voie pour manifester ce qui veut se dire et veut se jouir.
Le symptôme étant propre à chacun, "chaque Un" est évidemment le seul à en détenir le mystère. Cependant, ce qui le fait souffrir lui semble si aberrant qu'il ne peut se croire détenteur de ce savoir, et pense que c'est le psychanalyste qui sait ce qui le dérange et soutient son mal être. Il en fait ainsi ce que l'on appelle, avec Lacan, un " sujet supposé savoir". Depuis toujours, les hommes, les êtres humains, les parlêtres, ont attribué à un Autre du savoir concernant leur être: toutes les sortes de divinités existant en ce monde, ceux dont elles parlent par la bouche, ceux qui parlent en leurs noms, ceux qui sont censés déchiffer et interpréter leurs messages ( chamans, prêtres, pasteurs, imans, maîtres de sagesse), mais aussi le médecin de famille, l'instituteur d'autrefois, certains leaders charismatiques et bien d'autres encore.
Alors, qu'est-ce qui distingue tous ces savoirs supposés de celui accordé au psychanalyste? Ce qui fait la différence est que le savoir, que celui qui s'adresse à lui attribue au psychanalyste, concerne l'inconscient - qui n'est pas la même chose que le non- conscient.
Une fois franchies les étapes de la décision, puis de la demande adressée à l'analyste, parfois de vive voix, le plus souvent par téléphone, exceptionnellement par d'autres moyens, vient le temps de la première séance. Le patient, ou l'analysant en puissance, s'efforce de mettre en mots ce qu'il a le plus souvent bien du mal à formuler et ne peut que balbutier dans ces premiers moments. L'analyste interprête avec pertinence, à point nommé, de façon à réveiller l'inconscient de celle ou de celui qui a le courage de mettre en jeu ce qui la/le fait souffrir dans l'existence, ainsi que le destin qu'il/elle s'est forgé.
Au fur et à mesure des séances, l'analyste souligne, ponctue, coupe, insère des points d'interrogation dans le discours du sujet, lui fait entendre son propre dit. Il opère avec adresse et sobriété, et la coupure de la séance en détache le dernier mot qui fera souvent ouverture de l'inconscient, dans l'après-coup, et favorisera l'émergence de ce que l'on appelle " des effets de vérité", c'est à dire la vérité propre au patient/ analysant; vérité ( "varité" dit Lacan, pour souligner la variabilité de la vérité) qui surgit dans ses associations, ses souvenirs, sa façon singulière d'avoir vécu et interprété les évènements de son existence, les paroles entendues, les comportements; sa façon toute personnelle de penser, son système de valeurs. Les mots, ceux de l'analyste, ceux du patient/analysant, que la séance met en exergue, ainsi que leurs effets de vérité respectifs et conjugués, vont peu à peu former et façonner un savoir propre au sujet et tisser la trame singulière de son inconscient.
Afin que se constitue ce savoir propre au sujet, l'analyste procède avec tact, notamment dans le maniement de la séance. Ce qui scande le temps de la séance n'est ni la montre, ni le souhait de l'analysant, ni les obligations, ni les standards, mais l'inconscient de l'analysant. L'analyste ne regarde pas sa montre, et la coupure de la séance s'impose selon le dit de l'analysant. La durée n'est pas le pivot de la séance analytique. Le pivot en est l'acte de l'analyste. Il ne s'agit alors ni de séances dites "courtes", ni de séances dites " longues", ou de telles autres, standards, mais de séances à durée variable, réglées sur l'imprévisibilité de l'inconscient.
L'analyte ne surestime pas les capacités de celui qui s'adresse à lui à supporter son acte ( l'acte de l'analyste). Il ne les mésestime pas non plus. Il le conduit simplement, sans concession ni forçage impossible à supporter, jusqu'où il peut aller, à chaque moment.
L’ Analyse personnelle est appelée « cure analytique », ou « expérience ». Sa durée, tout comme celle des séances, d’ailleurs, ne peut être fixée à l’avance puisqu’elle dépend de l’inconscient de chacun, du temps qu’il faut à un sujet donné.
Une analyse ne peut se faire uniquement dans un but de formation. Il est nécessaire que le parlêtre qui souhaite s'y engager reconnaisse que quelque chose ne va pas, cloche pour lui, le dérange, le fasse souffrir, qu’il y est pour quelque chose dans ce qui lui arrive, que cette clocherie fasse suffisamment énigme pour qu’il décide de s’adresser à un psychanalyste. Le patient/analysant riche de cette "implication subjective", s’engage alors sur le chemin d’une expérience à nulle autre pareille. Seul, celui qui souhaite occuper la position de l’analyste devra mener son analyse à sa fin, pour tout autre analysant, elle prendra fin lorsqu’il estimera qu’il se débrouille dans l’existence d’une façon satisfaisante pour lui et que la souffrance qui l’avait conduit à s’adresser à l’analyste n’est plus de mise.
Que sait donc l'analyste ? Comme nous l'avons dit, l'analyste ne cherche pas à imposer quoi que ce soit, rien de ses propres opinions, de ses désirs, de sa conception de la vie; aucun comportement standard. Il ne suggestionne ni ne formate, n'encourage pas les identifications, ne tente pas de faire correspondre à des normes le parlêtre qui s'adresse à lui. Il ne met pas d’entrave à l'avancé de son travail, ne l’oriente donc pas, de façon à ce que, au rythme qui est le sien, un sujet prenne la mesure de l’insoupçonnable de sa propre vérité, mais aussi de la jouissance qui l’anime, qu'il puisse la réduire, l’apaiser, la déplacer, et trouver sa solution singulière.
L'analyste ne s'embarasse pas d'idées préconçues, ce qui lui permet d' être disponible à la surprise dans son écoute de l'analysant, afin de le conduire, non pas vers ce qu'il estimerait correspondre à son bien s'il s'orientait sur des idées a priori et sur des normes, mais vers sa singularité, sa différence absolue. C'est ce que permet la position de l'analyste.
Ce que l’analyste sait, ce n'est donc pas le savoir du sujet qui s'adresse à lui, mais ce qu’il a appris de sa propre analyse et de sa formation. C'est au fil des séances, avec l'avancé du travail analytique, qu'il découvrira le savoir de celui qui est venu parler pour le dire, et il le lui fera entendre.